Le montage du projet des Hauts de l’Armançon a fait l’objet d’une approche spécifique :
- Études écologiques adaptées au contexte forestier :
- Plus de deux ans d’études sur le terrain ;
- Couverture de l’ensemble des cycles écologiques ;
- Dispositifs d’écoute adaptés aux chauves-souris, avec des écoutes en canopée ;
- Inventaires approfondis des arbres potentiellement utilisés par les oiseaux nicheurs ou les chauves-souris ;
- Protocoles spécifiques adaptés à certaines espèces.
- Phasage des études écologiques :
- L’étude préliminaire menée de juillet à décembre 2016 a permis d’identifier les principaux points de vigilance écologique de la zone d’étude et de ses abords;
- L’étude détaillée réalisée de janvier 2017 à août 2020 a permis d’analyser finement et de hiérarchiser les enjeux et impacts potentiels de la construction et de l’exploitation du parc éolien. Cette phase a permis de déterminer des mesures d’Evitement, de Réduction et de Compensation, et plus largement d’élaborer le Programme Environnemental du projet.
- Des inventaires ornithologiques complémentaires ont été réalisés entre 2020 et 2023.
Retour sur l’étude écologique
Le bureau d’étude Ecosphère a réalisé l’étude écologique pour le développement du projet éolien des Hauts de l’Armançon. Cette étude est basée sur des observations effectuées sur le terrain entre juillet 2016 et l’été 2023, soit plus de 5 ans ! Un total de 2400 heures de terrains effectuées, représentant environ 325 jours (à temps plein) sur le terrain afin de hiérarchiser les enjeux et les impacts potentiels et de déterminer les mesures dite E.R.C, réalisés par une équipe de 10 naturalistes aux compétences complémentaires.
La flore et les habitats naturels
Plus de 340 espèces floristiques ont été identifiées sur la zone d’étude d’une surface de 1500 hectares parmi lesquelles quelques espèces d’intérêt et rares en Bourgogne-Franche-Comté telles que le Caucalide, l’Alisier de Fontainebleau, la Céphalanthère à feuilles étroites, la Gentiane ciliée et la Dauphinelle consoude.
Les impacts sont principalement liés au défrichement de milieux boisés lors des premières étapes de construction du parc éolien. L’ensemble des stations d’espèces à enjeux ainsi que les habitats naturels à enjeu (tels que des pelouses calcaires) ont été évités lors de la conception de l’implantation, par identification précise de leur localisation. Lors des travaux, seules une station des trois espèces de Dauphinelle consoude, Limodore à feuilles avortées et d’Alisier de Fontainebleau se trouveront à proximité des chemins à créer et seront donc balisées tout au long du chantier (protégées par une barrière de signalisation) pour éviter leur destruction.
Les oiseaux
111 espèces d’oiseaux nicheurs ont été recensées lors des inventaires dont l’Alouette lulu , la Grive litorne en périphérie du boisement où se situe le projet, le Faucon pèlerin, le Milan royal, la Cigogne noire à plusieurs kilomètres. L’étude a permis d’identifier que le massif boisé ne présentait qu’un intérêt modéré pour l’avifaune nicheuse, les principaux enjeux étant localisés en périphérie. En dehors de la période des nids, la zone d’étude présente également un faible intérêt comme site de halte migratoire ou d’hivernage.
Pour les oiseaux cavernicoles (qui utilisent les cavités dans les arbres notamment pour faire leur nid) et certains oiseaux forestiers comme le Pic épeichette et l’Autour des palombes, le risque de destruction ou d’abandon du nid lors des travaux existe, entrainant un potentiel impact jugé moyen sur ces espèces, avant toute mesure pour l’éviter ou le réduire.
Pour cela, des aménagements du chantier auront lieu de façon à limiter les dérangements engendrés par le bruit des engins de travaux en adaptant le calendrier du chantier au calendrier écologique, c’est-à-dire en dehors de la période sensible à l’établissement de ces oiseaux qu’est la nidification.
Aussi, l’implantation des éoliennes a été réalisée en tenant compte des sensibilités des espèces d’oiseaux aux risques de collision et de perturbation lors de la reproduction.
Pour la majorité des oiseaux recensés, la perturbation de leur territoire durant l’exploitation du parc éolien est faible, certains couples d’espèces d’oiseaux tel que le Pouillot siffleur (non menacé et assez commun en Bourgogne-France-Comté), installés à proximité des éoliennes, pourraient être déplacés.
L‘impact lié au risque de collision avec les éoliennes pour l’ensemble des oiseaux nicheurs recensés est faible, du fait de l’éloignement des pales de la cime des arbres. Bien que cette espèce ne fréquente pas le massif boisé, seuls les jeunes faucons pèlerins, en phase d’apprentissage de vol sont plus sensibles à ce risque. Par ailleurs, l’implantation du projet en forêt, loin des axes migratoires, abaisse également ce risque pour les espèces migratrices. Pour celles où le risque de collision est possible, une surveillance accrue du parc par des ornithologues certifiés lors des pics de migration sera mise en place et permettra d’arrêter les éoliennes nécessaires pour réduire ce risque.
Afin de s’assurer que les mesures mises en place sont efficaces et suivre le cortège d’oiseaux et leur comportement vis-à-vis des éoliennes, des suivis des populations d’oiseaux seront effectués dès la mise en service et ce, tout au long de la vie du parc éolien.
Les chauves-souris
Afin de comprendre l’utilisation du massif boisé par les chauves-souris au niveau de la zone d’étude, plusieurs centaines points d’écoutes des ultrasons produits par ces petits mammifères volants ont été réalisés par les experts écologues (les chiroptérologues).
En plus des études au sol, des enregistrements d’ultrasons ont été effectués en continu au sommet des grands arbres (à cinq localisations différentes dans le boisement) afin d’évaluer l’activité des chauves-souris en hauteur.
Ainsi, près de 20 espèces de chauve-souris ont été recensées sur la zone d’étude, telles que la Pipistrelle commune, la Barbastelle d’Europe ou encore le Grand Rhinolophe, avec une répartition uniforme dans le massif boisé.
Les chauve-souris chassent et circulent quasi exclusivement au niveau des routes et chemins forestiers mais peu à l’intérieur des parcelles forestières, trop fermées pour des déplacements facilités.
Lors des études au sols, des investigations de gîtes en bâti ont été effectuées dans un rayon de 5 km : 52 gites en bâtis ont ainsi été identifiés. La grande majorité hébergent des effectifs très faibles et sont relativement éloignés.
Une analyse très fine des gîtes dans les arbres a été réalisée parfois avec des endoscopes. Ainsi 909 arbres favorables ont été identifiés dont 786 dans la zone d’implantation. Plusieurs de ces gites seront protégés lors du chantier afin de les maintenir. Afin de rehausser la valeur écologique des boisements et donc l’offre d’habitats favorables aux espèces forestières (notamment oiseaux et chauves-souris forestiers), des secteurs de vieux arbres ont aussi été localisés et seront protégés et préserver des activités de l’homme (sylviculture, randonnées…) pendant plusieurs dizaines d’années, créant ainsi des îlots de sénescence.
La taille des éoliennes avec le bas des pales situé à plus de 80m du sol et donc 60m de la cime des arbres (la canopée), réduit significativement le risque de collision pour les espèces locales de chauve-souris (volant particulièrement au-dessus de la canopée), hormis les chauves-souris de haut vol comme la Noctule commune et la Noctule de Leisler. Ces deux espèces, avec la Pipistrelle de Nathusius, sont également des migratrices susceptibles d’être touchées lors de leurs trajets à grande hauteur.
Ainsi, afin de préserver ces cortèges de chauves-souris, les mesures consistent d’une part en un défrichement planifié à l’automne où les risques d’atteinte à un gîte sont réduits et à une régulation du fonctionnement des éoliennes adaptée en fonction des activités constatées, avec un arrêt nocturne de l’ensemble des éoliennes programmé entre début avril et mi-novembre selon certaines conditions météorologiques favorables aux chauves-souris. Des aménagements favorisant le déplacement des chauve-souris dans les boisements et les éloignant des éoliennes seront d’autre part réalisés.
La faune terrestre
Lors des inventaires faunistiques, deux habitats naturels ont été mis en lumière, avec une sensibilité assez forte pour l’habitat du papillon « la Bacchante », localisé sur les chemins et layons forestiers ainsi que les coupes d’affouages récentes (l’habitat de la Bacchante évoluant avec les activités forestières) ainsi que pour l’habitat naturel du Muscardin (petit rongeur forestier) au niveau des lisières arbustives autour de la ferme de l’Autremont.
C’est lors du chantier que les impacts sur l’habitat de la Bacchante sont possibles, en effet, la Bacchante, papillon protégé pond souvent sur les bords de chemin, dont certains seront détruits par l’aménagement des pistes d’accès.
L’implantation des éoliennes a été réalisée en tenant compte de ces sensibilités, en évitant certains chemins et layons favorables à la Bacchante. De plus, des aménagements dans les boisements permettant la création et l’entretien de milieux favorables à ce papillon sont prévus à différentes échelles dans le temps et l’espace, afin d’améliorer les conditions d’accueil des populations de Bacchante, pour les pérenniser voire les développer.
Les mesures écologiques en bref
Comme il a été développé plus haut, à l’issu des inventaires écologiques et de leur analyse, des mesures écologiques d’évitement, de réduction et de compensation des impacts du projet éolien sur les groupes faunistiques et floristiques ont été identifiées et peuvent prendre plusieurs formes :
- Des mesures d’évitement et de réduction des impacts en phase de conception du projet : En effet, dès la conception du projet, l’implantation des éoliennes a été travaillée de telle sorte à éviter les secteurs sensibles pour la faune et la flore comme la combe de l’Autremont ainsi que certains arbres à cavité accueillant oiseaux ou chauves-souris ou encore les layons forestiers favorables à la Bacchante. Le choix d’un modèle d’éolienne de grande hauteur constitue également une mesure de réduction de l’impact lié au risque de collision car il permet une grande distance entre le bas des pales et la cime des arbres de plus de 60m , préservant ainsi ce couloir de vol privilégié notamment des chauves-souris chassant juste au-dessus de la frondaison des arbres.
Des mesures de réduction des impacts lors des travaux de construction du parc
Ces actions consistent notamment en la limitation de l’emprise du chantier avec une signalisation stricte des secteurs écologiquement sensibles, aux mesures de prévention des pollutions des eaux et des sols, ainsi qu’en la réduction de l’impact du projet sur certaines espèces à enjeu grâce à une veille ornithologique avant et pendant le chantier, une protection des haies lors de l’aménagement de pistes d’accès au boisement. Pour la faune volante, la mesure de réduction principale consiste en l’adaptation du calendrier des travaux (hors période de nidification) pour limiter le dérangement (aussi bien pour les oiseaux que pour les chauve-souris).
Des mesures de réduction en phase exploitation du parc
Pour réduire le risque de collision des oiseaux locaux ou en migration, des systèmes de détection automatiques avec avertisseurs sonores, étudiés spécifiquement pour dévier légèrement les oiseaux de leur trajectoire vers les éoliennes tout en évitant le dérangement des riverains, seront installés en nacelle de certaines éoliennes du parc. Ces systèmes seront effectifs lors des pics migratoires des oiseaux ou encore lors de la période d’envol des jeunes faucons pèlerins et l’arrêt d’éolienne sera envisagé si le risque de collision est trop important, confirmé par des ornithologue expert sur site. Pour les chauves-souris, une mesure d’arrêt programmé de toutes les éoliennes du parc est prévu d’avril à mi-novembre, toute la nuit , en fonction de conditions météorologiques favorables au vol des chauves-souris, afin de protéger ces dernières du risque de collision. Cet arrêt nocturne bénéficiera aussi aux oiseaux migrant de nuit. Enfin, l’aménagement d’itinéraires favorables dans les boisements (création de passages dégagés entre les actuels axes de vol dans la forêt) permettant aux chauves-souris de s’éloigner des éoliennes constitue également une mesure de réduction du risque de collision.
Néanmoins, bien que les mesures citées ci-dessus réduisent significativement les impacts pour la majorité des espèces faunistiques et floristiques, il subsiste un potentiel impact (qu’on appelle « impact résiduel ») sur certaines espèces (oiseaux cavernicoles, les chauves-souris forestières et la Bacchante), nécessitant de mettre en place des mesures de compensation. Elles s’articulent autour de trois grands types de mesures : la création d’îlots de sénescence (secteurs de vieux arbres qui seront volontairement abandonnés, jusqu’à l’effondrement de ces arbres) qui offriront sur le long terme des habitats très favorables à l’établissement des oiseaux cavernicoles et des chauves-souris forestières. Cette action répondra concrètement aux impacts sur la faune volante forestière, avec une surface de boisement de 89 ha qui ne sera plus exploité afin que les cycles naturels puissent s’accomplir. Ces îlots viennent compenser, avec un ratio trois fois supérieur, le défrichement réalisé pour la construction du parc (qui est de 18ha, soit environ 1 % de la surface de la zone d’étude). De plus, plusieurs centaines d’arbres identifiés lors de l’étude d’impact ou recherchés ultérieurement seront protégés à l’échelle individuelle partout dans le massif, permettant aussi de protéger l’habitat des espèces cavernicoles. D’autres mesures de génie écologique seront mises en place pour rehausser le niveau de biodiversité dans le massif boisé telles que :
- la création et l’entretien de clairières et de continuités thermophiles au niveau du versant est de la combe de l’Autremont et en périphérie du boisement;
- la création et l’entretien de milieux favorables à la Bacchante afin d’améliorer les conditions d’accueil des populations de ce papillon protégé, les pérenniser voire les développer dans les secteurs où un établissement est impossible actuellement.
Les mesures d’accompagnement
Enfin, plusieurs autres mesures en faveur de la biodiversité locale complètent les précédentes. Ces mesures sont dites « d’accompagnement » car elles n’ont pas de caractère réglementaire obligatoire. Elles apportent une plus-value écologique globale ou spécifique à certains groupes d’espèces. Nous pouvons citer entre autres :
- la protection et l’aménagement de gîtes en bâti pour les chauves-souris;
- la modification des plans de gestion forestiers en faveur des oiseaux, des chauves-souris et de la Bacchante
- la recherche et la protection des aires de rapaces forestiers En plus des mesures de compensation, ,
- la préservation à long terme d’arbres remarquables dans les villages (comme par exemple dans le parc du château de Nuits)
- le traitement de lisières forestières en faveur du Muscardin
- la création de mares et d’abris à reptiles et amphibiens
- les actions de développement de l’agriculture biologique et de l’agriculture raisonnée autour du massif boisé et à proximité des berges de l’Armançon et du Bornant
- la réhabilitation de milieux humides dans les vallées
- la plantation de vergers conservatoires,
- le maintien de pelouses et prairies calcicoles,
- la protection d’un nid de Cigogne noire et une étude du comportement de vol de cette espèce emblématique…
L’ensemble des mesures écologiques permettront d’atteindre l’objectif souhaité par la loi Biodiversité (2016 – Ministère de la Transition écologique et Solidaire) de zéro perte nette de biodiversité, voire un gain net de biodiversité sur le site du projet éolien des Hauts de l’Armançon. Ces mesures entrent également dans le cadre de l’initiative collective souhaitée par les maires de Nuits, Cry et Aisy-sur-Armançon, le Programme Environnemental.